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Le convoi

Ils avancent lourdement dans le jour qui surgit

La route s'ouvre comme une plaie

Qui se referme sur leur passage

Et qu'ils ouvrent comme une plaie.Au pied de grands barrages, ils s'arrêtent et s'endorment

Ils rêvent de fruits et de baies

De charbon posé sous le feu à ciel ouvert

Ils rêvent de fruits et de baies.Bientôt, bientôt, tu les verras

Comme un fleuve naissant au grand jour

Bientôt, tu verras le convoi

Et tu prendras peur de l'amour.Ils s'échangent des signes

Comme des mots d'une langue inconnue

D'un pays qui ne veut rien dire

Et dont l'histoire s'est perdue.

Ils marchent sur le couloir

D'un temps de longue haleine ;

Ils ne fuient pas mais ils sont prêts

À prendre ce temps par les rênes.Bientôt, bientôt tu les verras

Comme un fleuve naissant au grand jour

Bientôt, tu verras le convoi

Et tu prendras peur de l'amour.On dit "la fatigue les tuera, la mort

N'est que l'autre nom du chemin qu'ils ont pris"

Mais rien ne dit, non, rien ne dit

À les voir, qu'ils vivent encoreMême s'ils marchent et se sourient

Même s'ils rêvent de fruits et de baies

Qu'ils ouvrent la route comme une plaie

Rien ne nous dit, non, qu'ils vivent encore.

Bientôt, bientôt, tu les verras

Comme un fleuve naissant au grand jour

Bientôt, tu verras le convoi

Et tu prendras peur de l'amour.L'amour est le grand oncle qui mène le convoi

C'est l'intenable promesse, l'incertitude absolue

C'est le miracle d'un sommeil lié au miracle des rues

Qui, envenimées, d'un même élan se soulèvent ;Une seule main pour guide, le route ne ment pas

La route ne mentira jamais

Où qu'elles les mènent, à ceux qui ont joint le convoi

La route dit tout ce qu'elle sait.Bientôt, bientôt, tu les verras

Comme un fleuve naissant au grand jour

Bientôt, tu verras le convoi

Et tu prendras peur de l'amour.C'est une force immense, c'est l'irrigation même

Le flux du sang des morts qui rouvre les fontaines

Les valves qui tournaient, les canaux qui laissaient tout passer

Les fluides les plus troubles, les eaux les plus salées.C'est ce fardeau rêvé qui les mène et qui freine

L'avancée du convoi, les pas sont si chargés :

Tant d'efforts pour sentir s'écouler dans ses veines

Le flux du sang des morts ravivant les fontaines.Certains flanchent en chemin ; la route se referme

Sur eux, maquillés d'herbe et de nuit ;

Ils rêvent encore et le rêve les préserve

Ils ne sont ni vivants ni morts

Ils sont de l'ombre qui pâlitCar hors du convoi

Il n'y a plus d'espoir à perdre

Plus de regard à capturer

D'alvéoles baignées de lumières ;Hors du convoi

Le temps est un billet froissé

Une banque aux avoirs gelés

Un périple de sédentaire.Et là, maintenant, tu les vois

Comme un fleuve naissant au grand jour

Et tu te glisses dans le convoi

Effrayé de mourir d'amourEt tu te glisses dans le convoi

Dans le fleuve qui emporte tout

Une route s'ouvre devant toi

Qui se fermera derrière nous.

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